La tournée de Julien Clerc
Quatre salles en quatre semaines. Aujourd'hui, Julien Clerc se lance dans une tournée parisienne originale où il enchaînera le Bataclan, le Casino de Paris, le Zénith et l'Européen.
Le marathon parisien
Quatre salles en quatre semaines. Aujourd'hui, Julien Clerc se lance dans une tournée parisienne originale où il enchaînera le Bataclan, le Casino de Paris, le Zénith et l'Européen.
Des 5000 spectateurs du Zénith aux 250 places de l’Européen, un beau contraste. Evidemment, Julien Clerc présente deux répertoires différents. Il promet un retour à des sonorités un peu rock’n roll pour le Zénith et un concert plus acoustique dans les autres salles. Dix chansons incontournables communes aux deux tours de chant, et treize ou quatorze autres propre à chacun des deux programmes. Au total, une quarantaine de chansons répétées, dont environ la moitié de son dernier album, Si j’étais elle (Virgin 2000) et des chansons qu’il n’a plus chantées depuis des lustres. Il nous raconte.
Vous choisissez encore une formule originale pour votre rentrée parisienne, comme si votre tournée acoustique de 1999 vous avait libéré...
Cette tournée acoustique m’a vraiment fait découvrir de nouvelles choses, ce qui est toujours agréable à cinquante ans. Elle m’a fait voir mon métier d’une autre façon et j’ai commencé alors à me permettre de remettre en question les arrangements et les productions des chansons. Je n’avais que deux musiciens et j’étais obligé de les transformer. Je me suis alors rendu compte qu’on pouvait faire plein de choses sans trahir l’âme des chansons.
Comment procédez-vous pour choisir les quarante chansons des deux spectacles ?
Je prends le coffret de l’intégrale de mes disques et je lis les titres sur les pochettes. Je regarde ce que je n’ai pas fait depuis longtemps, ce que j’ai envie de faire, quelle chanson incontournable peut être remplacée par quelle autre chanson incontournable, pour maintenir la même proportion de terrain connu et de terrain un peu aventureux pour le public. Oui, malgré tout on est content, quand on va au concert, d’entendre ce qu’on connaît ! Et puis je demande leur liste à deux ou trois personnes dont le jugement m’importe, je sens le vent sur ce que les gens ont envie d’entendre ou de réentendre. Après, je fais ma synthèse et je me lance en travaillant un peu plus de chansons qu’il n’en faut. Après, intervient la logique dramaturgique du tour de chant, la logique musicale des enchaînements. Finalement, ce n’est pas toujours ce qu’on a mis sur le papier.
Est-ce plus difficile de préparer deux tours de chants à la fois ?
Absolument pas. Et puis, avec quarante chansons répétées, vous vous rendez compte des opportunités de changement, des possibilités de permutation.
Le tour de chant que vous jouerez au Zénith est-il le spectacle qui va partir en tournée ?
Oui, pour l’essentiel. Mais il y a forcément des chansons de l’autre formule qui vont me plaire et que je serai frustré de ne pas faire. Et puis la personnalité des musiciens compte beaucoup, c’est pourquoi je change régulièrement d’équipe. Yves d’Angelo, avec qui je travaille pour la première fois, apporte vraiment beaucoup.
Ecrivez-vous toujours de la même manière ?
Forcément, on évolue. Je me dis parfois, en entendant certaines chansons « Tiens, c’est bizarre que j’ai fait ça ». Mais, profondément, je crois que j’écris aujourd’hui exactement de la même façon que j’ai toujours écrit.
Avez-vous une méthode ?
J’écris sur mon piano, un Yamaha qui a plus de trente ans. Je l’avais acheté pour ma première maison de campagne puis je l’ai fait transporter ici à Paris. Pour composer, je joue des accords et je fais lalala : j’invente les mélodies en chantant. Le côté rythmique se fabrique après, même s’il est souvent implicite dans ce que j’écris. Depuis le premier jour, ma façon de faire est toujours la même et c’est pourquoi j’aime bien co-composer. Généralement, je me garde la mélodie et j’aime bien qu’on m’amène autre chose harmoniquement ou rythmiquement. Ainsi, travailler avec un guitariste est pour moi une nouveauté, ça me fait travailler différemment. Sur le dernier album, j’ai écrit avec Hervé Brault une petite valse sur un texte de David McNeil, Tu t’es en allée. C'est vraiment un truc de guitariste que je n’aurais pas trouvé tout seul. Cette suite harmonique peut se trouver au piano, mais pas naturellement. Pour les trois chansons que j’ai co-composées avec lui, Hervé Brault m’apportait des CDs entiers de maquettes - rythmes et harmonies avec déjà un pré-arrangement - dans lesquels je choisissais des motifs qui suscitaient des mélodies. Mais je crois quand même que les choses les plus rares, les plus intemporelles, se font en dehors de toute contrainte, rythmique ou autre. Je sors maintenant du contexte dans lequel les gens connaissent certaines chansons que je joue, par exemple seul au piano, et l’émotion est toujours là. C’est ça que je sais faire.
Pour le commun des mortels, vos chansons ne sont pas très faciles à chanter. Vous en rendez-vous compte ?
J’y pense tout le temps. Mais ça ne m’empêche pas de les faire comme ça ! Je l’ai forcément en tête, j’ai tellement entendu, « vos chansons sont difficiles à chanter ». Mais il y a des moments où je ne peux pas faire autrement, il y a une logique de la musique. J’ai ce débat-là avec moi-même depuis quelques années. Avant, j’y prêtais peut-être moins attention.
Bertrand Dicale