Salif Keita

Un album enregistré entre trois eaux, deux dates parisiennes pour relancer la machine. Et nous voilà à nouveau aux côtés d'un des plus dignes représentants de l’Afrique de l’ouest sur la scène de la world internationale.

Le retour…..

Un album enregistré entre trois eaux, deux dates parisiennes pour relancer la machine. Et nous voilà à nouveau aux côtés d'un des plus dignes représentants de l’Afrique de l’ouest sur la scène de la world internationale.

Salif Keïta est de retour. Et il est en super forme. Le public parisien de la Cigale, convié vendredi 11 et samedi 12, peut l’attester. Un show musclé au dynamisme rock entraînant. Un côté "je-me-lâche-parce-que-je-vous-aime-éperdument" que ses fans se chargent de transmettre à coups d’applaudissements sur-vitaminés à ceux qui découvrent cette musique composée et enregistrée entre Bamako, Paris et New York. Quelques tubes en perspective ("Bolon" ?). Une ambiance pop qui refuse les étiquettes, bien que l’artiste insiste pour garder le son du terroir. A la sortie du premier concert, on pouvait passer d’un avis à l’autre, le propos restait le même : «Sa voix est géniale». Trouvez meilleur compliment pour un artiste dont la voix a toujours incarné un royaume à part dans l’univers épique des sons mandingues. Il possède le timbre puissant d’un fils prodigue qui n’aurait jamais dû partager la mythique scène des griots/commandeurs de la parole, parce qu’issu d’une lignée noble. On pense au gâchis que cela aurait pu représenter… La magie de sa voix prouve en tous cas qu’il n’a pris aucune ride.

Musicalement, la tendance est à la diversité pour cet album qui est partiellement dédié à quelques proches disparus et qui rend surtout hommage au père décédé en 95, d’ou son titre phare ("Papa"). De morceau en morceau, on glisse dans une espèce de diversité fédératrice. On a l’impression que le lion du Mandé se cherche une nouvelle identité à l’approche du 3ème millénaire. Alors il revisite le passé et la tradition, ramène à lui ses dernières aventures musicales sur une scène internationale qui n’a pas toujours été de bon conseil et sonde le futur en risquant quelques mariages osés sur le plan instrumental et vocal (notamment dans le titre "Gnokon Fe") qui promettent bien des surprises au mélomane. Est-ce la touche de Vernon Reid, co-producteur et guitariste du légendaire groupe de hard fusion Living Colour, qui donne à l’album son optimiste futuriste ? Est-ce le fait que Salif ait changé de maison de disque (Blue Note/Emi) qui redonne des couleurs à ses messages d’espoir ? Toujours est-il que Salif Keïta est revenu depuis quelques années au Mali où il a ouvert un studio d’enregistrement dans le but de soutenir la naissance d’une nouvelle vague du son africain. Ceci pourrait expliquer cela.

Vingt ans après avoir contribué à ré-inventer la «sono mondiale» à Paris, l’artiste tente à nouveau de marier les sons du continent à ceux du reste du monde… pour notre plaisir. A la fin du concert vendredi, il y eut deux offrandes au public. Une ballade, "Sada", qui salue Sada Diallo (un mécène) à titre posthume, interprétée merveilleusement en version acoustique. Une couleur qui manque à l’ensemble de l’album et que ne manqueront pas de relever ses fans une fois sortis de ses concerts, s’il renouvelle l’expérience. Ensuite, ce besoin de faire monter le public sur la scène pour danser sur le dernier morceau.

Soeuf Elbadawi

"Papa" (Capitol Records)