Dan San retrouve son chœur
Dan San, la formation liégeoise, qui a connu un succès d'estime avant que ses membres ne voguent vers des projets parallèles, revient avec Shelter. Ce deuxième album de folk-pop atmosphérique, dont la sortie française est prévue dans quelques semaines, ne manque pas d'attrait.
Francofolies de Spa, 21 juillet. Ni l'horaire de passage (aux environs de 15 heures), ni la chaleur assommante ne vont venir contrecarrer la saveur de l'instant.
À la lumière de Dan San, enthousiasme et qualité d'écoute convergent dans le même élan, pour réunir finalement des spectateurs aux attentes et humeurs mélangées. Les chansons sont bienfaitrices, apaisantes et célestes. Les plus attentifs avaient déjà remarqué ce sextet sur Domino, disque boisé paru en 2012.
Puis, après une tournée assez dense de 120 dates, le groupe en perpétuelle mutation – à la base il s'agissait d'un duo - avait enclenché la touche pause. ”Certains ont été surpris de ce choix. Mais on avait fait un autre disque complet qui n'est pas sorti ainsi qu'un EP. Chaque membre avait envie d'explorer d'autres voies”, explique Thomas Médard, chanteur à l'allure négligée.
Des retrouvailles difficiles
Les retrouvailles ne sont pas si aisées : divergences artistiques, querelles d'ego, interdiction de roupiller sous ses lauriers. Malgré quelques tentatives d'approche outre-Atlantique, c'est finalement Yann Arnaud (Syd Matters, Air, Phoenix) qui se révèle l'homme de la situation. ”Il a été l'arbitre, le capitaine, celui qui prenait la décision quand on n’arrivait pas à trancher. En plus d'avoir une oreille, il a un vrai sens des relations humaines. Il a réussi à cerner nos personnalités et à nous apprivoiser”, poursuit le chanteur.
Les difficultés engendrées pour accoucher de Shelter n'empêchent pas son extrême raffinement, son enchanteresse luxuriance et sa grâce des harmonies vocales. Parce que chez Dan San, on s'exprime principalement en chorale : ”C'est notre identité depuis le début”, confie l’un des membres.
"Mettre en avant ce côté musique de film"
Disque donc qui perpétue la belle tradition des trésors cachés, loin des morceaux bavards formatés pour la FM. Ici, on est entre l'ombre et la lumière, les mélodies radieuses et les méditations minimalistes. Il y a surtout cette faculté de faire entrer dans l'espace confiné d'une chanson des paysages entiers, des scènes panoramiques. ”On a toujours voulu mettre en avant ce côté musique de film. Sur cet album, la recherche des sonorités est plus fouillée”, explique Thomas Médard.
On retrouve, comme sur Domino, ce sentiment de pureté qui frappe de face comme un vent frais. À la différence que, les Liégeois se sont dotés entre-temps d'ailes pour s'aventurer dans une musique davantage pop et aérienne. C'est notamment marquant sur des titres tels que Dream et America.
Shelter enferme des grands espaces
Au-delà des arrangements harmonieux et de l'équilibre rythmique, Dan San puise son aura dans les grands espaces. Les éléments aquatiques, les rêves et les cauchemars sont les autres invités d'honneur du disque.
”La métaphore de l'eau, je ne m'en suis pas vraiment rendu compte. C'est assez naturel en même temps, car j'ai grandi près d'une rivière. Ensuite, je suis somnambule depuis des années. Quand j'étais petit, j'avais peur d'aller dormir chez les copains. À tout moment, je pouvais avoir une crise, crier et courir partout. Jérôme, le guitariste du groupe, a dû rêver des centaines de fois qu'il se faisait trucider”.
Pour l'auditeur, les chansons de ce deuxième album appellent aux songes sans jamais rien imposer de terrifiant. Bien au contraire.
Dan San, Shelter (Yotanka Records/JAUNEORANGE) 2016.