Nach, femme nature
Anna Chedid signe un deuxième album, L’aventure, où elle évoque les thèmes qui bercent sa trentaine. Fille chaleureuse, Nach creuse le sillon de la pop électronique, et affiche une voix puissante. La cadette du clan Chedid évoque son univers artistique, entre douce fantaisie et affirmation de soi.
Il y a trois ans, on l’avait découverte aux côtés de son père, Louis, et de ses deux frères, Matthieu et Joseph, à la faveur de la tournée familiale des Chedid. À cette occasion, Anna Chedid, alias Nach, nous était apparue en véritable performeuse, très à l’aise sur une scène qui est son élément naturel."La musique, c’est notre premier langage dans la famille. Dans le ventre de notre mère, on allait à des concerts. Avant même de parler et marcher, on avait des instruments partout. Il y avait plein d’artistes à la maison. Et puis, quand j’étais petite, je voulais tout le temps faire des spectacles. J’ai fait du théâtre, des claquettes, j’ai toujours eu ce truc de la scène. C’est ma manière de m’exprimer", raconte la jeune femme.
On imagine alors les déguisements que portait, enfant, cette fille timide et "pas très bien intégrée", qui entraînait le soir venu son frère Joseph dans ses représentations. Les deux derniers frères et sœurs de la fratrie Chedid, qui ont treize mois d’écart, ont été élevés ensemble. Enfants du divorce, ils ont connu les trajets d’une maison à l’autre, fréquenté les mêmes classes, et partagé les mêmes émotions."Depuis toujours à côté comme une ombre magique / Qui me suit, qui me sait, me sent et me devine / Juste à côté de moi / Bercée par la beauté de ce lien unique / Qui me serre me rassure, me ressent me retient", écrit-elle dans Joe, la chanson destinée à celui qu’elle appelle avec tendresse son "twin", son jumeau.
Une pop poétique
Il est logique, donc, de retrouver Joseph Chedid – aka. Selim – à la production de L’aventure, le deuxième album de sa soeur cadette."L’aventure, c’est plein de petites aventures qui en forment une grande. Mais c’est aussi l’aventure d’être soi-même, d’oser être qui l’on est, d’assumer ses imperfections. C’est pour cela que je me suis présentée sans maquillage, le plus simple possible, sur la pochette du disque", explique-t-elle. Les textes parlent d’amour et des préoccupations d’une femme française au début de la trentaine. Le fait d’être affranchi des prisons qu’on a construites jusque-là (Poids plume), les relations orageuses (Mon meilleur et mon pire), l’envie de maternité (Le bon moment)... C’est tout cela qu’évoque cette fille nature dont les réponses ne font pas de détours.
Les mots simples sont souvent marqués par la dualité et l’on comprend, en creux, que cette aventure s’est aussi nourrie de quelques douleurs. Dans les yeux de ma mère dit cela : "Dans les yeux de ma mère/J’ai vu comme c’est beau/J’ai vu comme c’est dur/J’ai vu comme la vie/Dans les yeux de ma mère/À dressé des flambeaux/Ravivé des blessures/Doucement de la nuit". Mais attention cela reste de la chanson, et l’ensemble demeure très léger. Cela semble d’ailleurs être une politesse commune à tous les membres de cette famille Chedid de prendre la vie avec pas mal de philosophie et d’envoyer des bonnes vibrations.
Une voix puissante
L’univers de Nach est ancré dans la pop électronique, et on regrettera qu’il penche souvent vers une variété facile d’accès. Auteure et compositrice qui a eu pour idoles "Billie Holliday, Nina Simone et Maria Callas", Anna Chedid est avant tout une chanteuse à la voix puissante et souple."Tout le monde devrait chanter, glisse-t-elle, prévenant que son propos va être un peu mystique. Le chant, c’est comme la danse, on s’est rendu compte que ce sont des activités qui font du bien aux êtres humains. C’est comme un massage intérieur. Il y a quelque chose de spirituel et de très puissant dans le chant, qui va au-delà de quelques vibrations (…) C’est comme si la réalité était à l’étage zéro. Et quand je chante, c’est un endroit un peu magique."
Alors bien sûr, on ne peut pas écouter Nach, sans penser au reste de sa famille. Mais Anna, 32 ans, qui a appris le métier en étant musicienne de son grand frère, -M- , assume cette filiation : "Ce n’est ni un avantage, ni un inconvénient. Les choses s’annulent. D’avoir eu des instruments assez tôt et d’avoir fait les choeurs de mon frère depuis l’âge de 8 ans, ça m’a mis le pied à l’étrier. Quand j’ai des doutes, des questionnements, j’en parle à mon père ou à mon frère, qui peuvent me donner leurs conseils. En même temps, je sens bien que médiatiquement, parfois, c’est plus compliqué. Ça peut être handicapant, parce que je suis toujours renvoyée à cela. Et puis, je sens que les gens n’écoutent pas mon album objectivement parce qu’il y a cette donnée-là qui rentre en ligne de compte. Mais le public fait souvent la part des choses."
Pour que le public puisse juger sur pièces, Nach a décliné son aventure sous trois formes artistiques : un disque, des concerts et un film qui illustre trois de ses chansons."Parce que j’ai envie que ce soit une nouvelle aventure artistique pour moi", dit-elle. Pour Anna Chedid, la vie va commencer…
Nach L'aventure (Polydor) 2019
En concert le 18 novembre au Trianon à Paris