Le rap français est-il misogyne ?

L’image de la femme dans le rap français. © Getty Images/Alen Popov

Malgré une profusion de textes relayant des propos profondément misogynes, le rap français semble pour l'instant avoir été épargné par les revendications nées de la vague #MeToo. "Le sale" continue de faire recette.

"T’es djomb, on se reverra peut-être bientôt/ J’ai vidé mes couilles, pas le sac à dos" (tiré de Djomb, titre le plus écouté de l’été sur Spotify France). On pourrait s’arrêter là et fustiger la haute teneur en misogynie de cet extrait du hit de Bosh, découvert dans la série Validé où il incarnait Karnage, rappeur psychopathe et hyper-violent. On pourrait également noter l’amusante tentative de séduction en intro de la chanson ("Ton boule me rend romantique") en guise de contrepoids.

Mais on peut aussi, plutôt que de fustiger une fois de plus un rappeur et ses propos, tenter de comprendre pourquoi la vague de féminisme qui a émergé ces dernières années suite à l’affaire Weinstein et au mouvement #MeToo a globalement évité la planète rap.

Michel Sardou et Orelsan ont un point commun

Flashback : On est au début des années 2000, le rap français est en période de récession. Dans la foulée du classique de Lunatic Mauvais Œil, une nouvelle génération met en avant le vécu des quartiers, l’illicite, bref le rap de rue. Après une décennie de rap conscient, les textes se radicalisent, font l’apologie de la vente de drogue et se complaisent dans la violence verbale. Quelques hommes politiques en profitent pour se faire de la pub en dénonçant les textes des rappeurs. De multiples procès ont émaillé l’histoire du rap en France, mais toujours pour des questions politiques (La Rumeur, NTM, Sniper, etc.). Si les procès sont plus médiatisés que la musique en elle-même, c’est parce qu’à quelques exceptions près, le rap français touche alors principalement un public spécialisé.

La montée en puissance d’internet et des réseaux sociaux va donner au rap une nouvelle plateforme d’expression et permettre l’émergence d’une nouvelle génération d’artistes. Le rap devient "la musique préférée des français", comme le proclame le titre d’un livre coécrit par Fif Tobossi, boss du site Booska P, et Laurent Bouneau, directeur des programmes de Skyrock. En 2009, Orelsan se retrouve au cœur d’un scandale médiatique avec son titre Sale pute, une fiction clippée écrite deux ans auparavant décrivant les pensées malsaines d’un homme trompé par sa petite amie.

On peut d’ailleurs en profiter pour trouver un point commun entre Michel Sardou et Orelsan : Le premier chantait "J’ai envie de violer des femmes, de les forcer à m’admirer, envie de boire toutes leurs larmes, et de disparaitre en fumée" (Les villes de grande solitude, 1973), le second "T’es juste un démon déguisé en femme, je veux te voir brisée, en larmes, je veux te voir rendre l’âme" (Sale pute, 2007).

Le point commun ? Outre la violence misogyne des textes, dans les deux cas le chanteur assume un rôle, joue un personnage, une fiction amplifiée dans le cas d’Orelsan par un clip qui accompagne le son, jamais sorti sur disque ou en streaming. L’histoire de Sale pute ayant largement été commentée, contentons-nous donc de noter que depuis, le rap n’a guère été épinglé pour ses propos sexistes. Même quand, en 2004, La Fouine rappe "Donc pétasse suis-moi dans mon hôtel, pour une volontaire agression sexuelle/ Faites monter les mineures j’suis pire que R. Kelly : 1 pour le sexe 2 pour la money" dans le morceau Sex et money. Ni quand, en 2015, Vald évoque le fantasme du viol dans la chanson Selfie ("Elle aimerait bien se faire violer, enfin pas vraiment violer/ Elle aimerait que je la violente, que je la casse sans demander").

Le rap épargné par la vague #MeToo

Et puis est arrivée l’affaire Harvey Weinstein et la vague #MeToo, qui ont impacté le monde de la culture, principalement le cinéma et la littérature. Et le rap ? Autant le débat sur l’homophobie dans le rap français a eu lieu autour de la polémique sur l’interview de Sexion D’Assaut en 2010, autant le sexisme parfois extrême de certains textes ne semble pas soulever de débat virulent.

Mehdi Maïzi, journaliste passionné de rap et animateur du podcast "Le code" sur Apple Music, explique cette apparente indifférence aux propos misos : "Parfois j’anime des émissions où on n’est qu’entre chroniqueurs mecs et quand il y a des propos misogynes, on n’est pas plus touchés que ça. On se dit 'Bon, ça fait partie du champ lexical rap, c’est pas bien mais voilà, le mec rigole'. Et puis quand on fait des émissions avec des chroniqueuses meuf, ou des auditrices, on se rend compte que ça peut être super violent. Donc on doit nous aussi questionner les rappeurs là-dessus. Parfois c’est compliqué, on est dans une sorte de proximité avec eux, on est entre kiffeurs de rap, on sait que c’est du second degré, en tout cas on est persuadés que ça en est, et donc que ça n’est pas grave. Alors que ça peut l’être. Vraiment. Il y a plein de femmes qui écoutent du rap et pour qui ça n’est pas forcément super cool d’être traitées comme de la merde dans les textes".

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Les rappeurs eux-mêmes sont-ils choqués par certains textes de rap? Driver, rappeur et animateur du podcast "Featuring", a un exemple en tête : "Dans Sors le cross volé, quand Jul dit 'Enlève pas ton string, je vais te violer', ça c’est dur. C’est peut-être le seul moment où je me suis dit 'Je ne défends pas'. Il n’y a pas de contexte, c’est gratuit, ça va loin. Djomb de Bosch, je peux comprendre qu’une fille soit outrée en regardant le clip mais moi, en tant qu’homme, je ne suis pas choqué parce qu’il y a un contexte".

"Parler de sexe n’est pas sexiste", assure le rappeur belge Damso, qui sait faire le grand écart entre des morceaux qui font grincer des dents et des textes émouvants. Lui aussi défend la notion de contexte : "Quand je parle de femmes, ce sont des histoires personnelles, jamais je ne fais de généralités. Je ne suis vraiment pas misogyne, je me suis même trouvé féministe sur certains points", déclarait-il en 2018 au Parisien. Ce qui n’a pas empêché les associations féministes belges de dénoncer ses textes qu’elles considèrent "remplis de mépris, de dégoût et de violence verbale envers les femmes".

Les rappeurs aux textes misogynes jouent-ils un rôle quand ils dégradent certaines femmes dans leurs lyrics ? C’est ce que l’on comprend en écoutant Kaaris, fameux pour ses textes hyper brutaux, s’exprimer sur le sujet en 2014 dans l’émission Clique de Mouloud Achour : "Les filles, elles sont comme nous en vérité. C’est nous qui avons cru qu’elles n’étaient bonnes qu’à la cuisine. Les femmes, c'est des pirates. Elles travaillent, elles sont modernes et elles aiment le bon son hardcore". Ce qui ne l’empêche pas de rapper dans son Freestyle 2.7.0 : "Une grosse baffe et une gorge profonde, j’lui envoie tout sur les ganglions/ En tout cas c’est ce que moi j’aurais fait pour réveiller Cendrillon". Dr. Jeckyll & Mr. Hyde ?

En janvier 2019, quelques mois après l’esclandre ultra médiatisée à Orly entre Kaaris et Booba, le magazine féminin Marie Claire propose un papier de Catherine Castro titré "Les rappeurs sont-ils misogynes ?". Il permet de mesurer le chemin parcouru depuis les années 1990, quand le rap français avait quasi systématiquement mauvaise presse. Des plumes féminines bien connues viennent témoigner de leur goût du rap, et tempèrent l’étiquette infâmante de sexisme qui plane tel un halo au-dessus de ce genre musical.

Ainsi Anne Cibron, manageuse d’artistes comme Booba et Orelsan, qui affirme n’avoir "jamais essuyé de remarques misogynes d’un rappeur. En revanche, les cols blancs de l’industrie, oui, ça y va". Et qui en rajoute une couche dans une interview à Madame Figaro où elle dénonce la misogynie de la société française plutôt que celle des rappeurs : "On pourra encore stigmatiser le rap pendant longtemps pour permettre à la France d’ignorer sa propre misogynie, qu’il s’agisse de siffler Cécile Duflot à l’Assemblée ou de faire de l’âge de Brigitte Macron un débat national".

Le rap moins homophobe mais toujours misogyne ?

Juliette Fievet, animatrice de Légendes Urbaines sur RFI et auteure du podcast "40 ans de rap" sur France Inter, n’est pas choquée par la misogynie dans le rap. Et revendique le second degré, y compris pour le public féminin, de plus en plus présent. "Ça m’amuse beaucoup, les titres comme Djomb. Parce que le rap a toujours fait ça, il y a toujours eu de la vulgarité. J’ai conscience que c’est un exercice de style à prendre au second degré. Les mecs ne disent jamais que toutes les meufs sont des putes. Et 70% du public des concerts de Niro, Fianso ou Ninho, ce sont des nanas qui chantent les paroles à tue-tête, et elles n’ont pas le syndrome de Stockholm, elles savent très bien voir la différence entre un exercice de style et autre chose ! Je me souviens en chicha, quand passait le titre de Vegedream où il dit 'pu-teuh !', dès les premières notes, les meufs hurlaient debout sur les fauteuils, certaines parce que ça leur faisait penser à leur ex-meilleure amie qui leur avait volé leur mec, et elles ne se sentaient pas agressées. J’ai un point de vue particulier parce que je sais qu’il y a des femmes dans le rap game depuis toujours, des manageuses notamment, et elles s’occupent de rappeurs qui sont des Bisounours, alors que toutes les histoires salaces type #MeToo que j’ai entendu, c’était dans des milieux politiquement corrects, plutôt du côté des énarques que dans le rap".

Interrogé par Booska P, Bosh revendique lui aussi le droit à la légèreté. "Pour moi Djomb ça a été de la facilité, sans être prétentieux. Aujourd’hui il est top 1, lyricalement parlant c’est pas une dinguerie, c’est de l’amusement, c’est du délire. Roms, jeune rappeur qui monte, enfonce le clou : "C’est un format radio et c’est devenu un tube malgré les textes, mais les paroles sont sans haine. Bosh ne ment pas, il représente des gens. Pour moi, c’est évident que c’est de la fiction. Si ça se trouve il est différent dans la vraie vie".

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Aladin 135, dont le récent projet Phantom le montre en couverture entouré de deux mannequins dénudés, fait confiance à l’intelligence des femmes : "Les femmes ont souvent plus de recul que nous sur le second degré. Quand je vois des jeunes filles écouter du rap, elles chantent encore plus les paroles, et ça les fait rire ! Certes, ça peut paraitre vulgaire pour d’autres générations qui n’ont pas eu l’habitude de voir les femmes aussi relâchées, mais je pense que ça fait aussi partie de l’évolution de la femme dans la société".

Mehdi Maïzi met cependant un bémol au joker "second degré" : "Le second degré, c’est une grille de lecture. Un personnage misogyne dans une chanson n’est pas forcément comme son auteur dans le privé. Je le pense toujours mais ça a ses limites, et on ne peut pas juste évacuer la question en disant ça, ce serait trop simple. La société évolue, donc on doit aussi évoluer en tant que rappeur, journaliste rap ou auditeur de rap".

Cette évolution, elle a déjà commencé dans le rap, notamment au sujet de l’homophobie. "Dans la nouvelle génération de rappeurs et rappeuses, il y a des choses qui ne sont plus dites, notamment homophobes, qui à l’époque étaient répandues" affirme Mehdi. "Je ne dis pas que ça a disparu, mais la nouvelle génération est plus woke sur ces sujets-là, et sur les femmes. Mais il y a aussi une partie du rap qui n’a pas bougé d’un iota et qui tient des propos sexistes. C’est une réalité dure à contredire".

Il y a aussi un point commun entre Brassens et Booba

Un exemple de cette misogynie musicale : "Il y a les emmerdantes, on en trouve à foison / En foule elles se pressent / Il y a les emmerdeuses, un peu plus raffinées / Et puis, très nettement au-dessus du panier / Y a les emmerderesses". Mais ce n’est pas du Booba, c’est du Brassens, chanteur réputé qui a donné son nom à des lycées. Deux poids, deux mesures ? Booba a volontiers été taxé de misogynie. Roms modère cette critique : "Quand Booba rappe 'Enlève tout, je m’en fous de la dentelle/ Balance ton misogyne à Angèle' dans Dolce Vita, il joue sur les gens qui vont trouver ça misogyne, mais c’est plus subtil en fait. Il parle de la bien-pensance, il est fidèle à lui-même".

Mehdi confirme : "Dans À la folie, Booba dit 'Malgré tout je les respecte toutes/ Tu le sais si tu as croisé ma route'. Même si Booba a souvent été vu comme le rappeur sexiste parce qu’il incarnait beaucoup de clichés pour pas mal de gens, je ne pense pas qu’il aurait considéré important de préciser qu’il respectait toutes les femmes il y a quinze ans. Peut-être que lui aussi a évolué, et c’est normal, c’est un père de famille. C’est loin d’être parfait aujourd’hui mais j’ai quand même l’impression que doucement, trop doucement, on avance dans le bon sens".

L’image globalement négative qu’ont les rappeurs auprès d’une partie de la population changera-t-elle si le contenu des textes change? Tessae, jeune rappeuse marseillaise, est une des trop rares artistes féminines du rap. Elle vient de sortir le clip de son morceau Salope, qui traite du harcèlement de rue. Du vrai vécu. "À l’époque où j’ai écrit le texte, chaque fois que je me connectais sur les réseaux, je lisais le témoignage d’une fille qui racontait qu’elle s’était fait agresser physiquement ou verbalement. Ma sœur, elle, s’est fait cracher dessus et insulter de salope. C’est de là qu’est né le morceau, c’est un ras-le-bol. En plus, ça n’est pas du tout pris au sérieux alors qu’on est en 2020".

Pour autant, Tessae ne fustige pas ses collègues, même si elle émet des réserves : "En vrai je pense que dans le rap français, il y a un peu de misogynie. Moi je me prends des commentaires disant que je fais des 'textes de tchoin' en parlant de Salope, alors que je traite du harcèlement de rue ! Une fille qui fait du rap, ça ne passe toujours pas pour certains". Sur des textes comme celui de Djomb, Tessae sait être indulgente. "Je sais qu’on peut écrire des textes sans penser de A à Z ce qu’on dit, juste pour suivre une mode. Des fois j’écoute parce que le mood est cool, mais je ne suis pas forcément d’accord avec certaines paroles, notamment quand les meufs sont insultées, même si je kiffe l’ambiance".

Faut-il censurer le rap misogyne? Privilégier la répression textuelle? Roms n’est pas de cet avis: "C’est difficile de juger à la place des femmes, je ne prends pas les textes comme elles. J’ai plein d’amies qui écoutent les mêmes chansons que moi, Ce n’est pas parce que la société est sexiste qu’on doit reproduire ça mais je ne pense pas que les rappeurs essaient d’être misogynes. Le rap, ça doit être instinctif. Je n’aime pas quand la censure ne vient pas de l’artiste lui-même, c’est bien d’avoir une équipe qui te donne son avis et te suggère d’éviter certaines dingueries. Après, si le mec est assez con pour la sortir quand même, il y aura une polémique, c’est normal".

Les hommes n’ont pas le privilège de la crudité verbale, des rappeuses comme Casey n’hésitant pas à hausser le ton et à employer des images fortes comme dans le très hardcore À la gloire de mon glaire en 2010 ("Qui est le plus vulgaire, d’entre le vandale, le rappeur et le vaurien/ Quand la tolérance zéro sévit sur le terrain/ Et que le pouvoir se comporte réellement comme le parrain ?"). Même Beyoncé a chanté dans Don’t Hurt Yourself quelques lignes bien senties à l’égard des mâles alpha, y compris son mari Jay Z : "You ain’t married to no average bitch, boy/ You can watch my fat ass twist, boy/ As I bounce to the next dick, boy" (Tu n’as pas épousé ta chienne moyenne, mec/ Tu peux mater mon boul qui remue, mec/ Pendant que je rebondis sur une autre bite, mec).

"Le sale", une valeur sûre

Une des explications du langage vulgaire pour évoquer les femmes se trouve peut-être dans ces lignes extraites du premier album de Nekfeu : "Pour séduire les filles, tout peut marcher sauf être un garçon bien". On peut bien le regretter, mais l’image du "bad boy" est une valeur sûre, et cela ne date pas de l’apparition du rap. Le rap français se conforme ainsi à une idée parfois préhistorique de la femme, à l’image d’une société qui valorise le pouvoir plutôt que le savoir.

"T’as pas de cerveau mais un gros cul, c’est déjà bien" lâche Kalash Criminel dans Patek, le clip d’Alkpote. Astuce et salto arrière : la formule est adressée à… Liza Del Sierra, fameuse actrice X française présente dans le clip, qui semble charmée du compliment de ce gentleman du ghetto (Sevran, en fait).

Un autre exemple ? "Elle serait prête à tout, même à se tatouer la tête de Marine Le Pen sur les fesses pour que je lui claque très fort/ Elle m’a dit '(…), je rêverais d’être ta chienne', je l’ai menottée de manière détachée". Kaaris ? Bosh ? Alkapote ? Non, Nekfeu dans Risibles Amours.

"Les rappeurs n’ont pas spécialement parlé de #MeToo", note Juliette Fievet. "Ce qui est marrant avec eux, c’est qu’ils peuvent écrire un texte sur les dix putes qu’ils ont baisées et le suivant sera une chanson larmoyante sur leur maman. C’est le paradoxe des rappeurs. Mais s’ils n’en ont pas parlé, ça n’est pas qu’ils ne se sont pas sentis concernés. On les taxe tellement de misogynie qu’ils n’allaient pas non plus se justifier, comme quand on demande aux musulmans de se désolidariser des terroristes alors qu’ils en sont les premières victimes".

Driver, lui non plus, ne croit pas à une prise de conscience qui viendrait des rappeurs eux-mêmes. "Il faudrait qu’il y ait plus de femmes, et là je parle dans le public, qui se lèvent et s’opposent quand elles entendent des chansons misogynes. Parce que ce qui est important et qu’il convient de souligner, c’est qu’il y a énormément de filles qui adorent des chansons comme Djomb. Si les filles ne se lèvent pas face à ce genre de morceau, qui le fera ? Pas les hommes ! On n’aura pas un #MeToo dans le rap tant que des filles aimeront ce genre de chanson".

Le débat ne risque pas de s’éteindre, et il y a fort à parier que certains textes de rap continueront à désigner certaines femmes comme des "putes" (Alkpote), des "sorcières" (Fianso), des "pétasses" (Freeze Corleone), des "salopes" (Aèlpéacha et tant d’autres). Pour Aladin 135, le public n’est pas dupe : "Les jeunes ont compris. Nous avant, on n’avait pas les réseaux sociaux et on était un peu dans le fantasme. On ne connaissait pas la vie des gens qui chantaient certaines choses. Aujourd’hui, les jeunes savent très bien que quand SCH fait le mafieux italien, ça n’est pas la réalité. Il n’y a plus de secrets pour le public, à part pour les très jeunes, à la limite. Les gens se rendent compte qu’on est dans l’entertainment".

Au final, tout se résume peut-être par cette terrible formule de Bosh, encore lui, dans son titre Cœur noir sur l’album Synkinisi : "Tu veux le hit parfait ? Parle de drogue et de grosses tasspés". Le "sale", cette notion essentielle dans le rap français des années 20, reste une valeur sûre pour attirer l’attention du public. Pas sûr pourtant qu’il ait besoin de s’accommoder de formules misogynes pour rester hardcore.