¿Who’s The Cuban?, le son latin rock
Après Circo en version live paru en 2020, ¿Who’s The Cuban? est de retour avec un troisième album intitulé Pafata. Derrière ce titre en forme d’interjection se cache un alliage musical métissé où se mêlent les rythmes cubains, le rock et la pop. Un shaker sonore porteur de textes caliente. Rencontre avec Pao Barreto et Thibaut Chipot deux membres du combo franco-latino à la veille de son concert ce jeudi à 20h30 au 360 Paris Music Factory dans le cadre du festival Au fil des Voix.
RFI Musique : votre combo s’appelle ¿Who’s The Cuban? Quelle est la signification des points d’interrogation entourant votre nom ?
Thibaut Chipot : ce nom est avant tout une grosse blague ! Il fonctionnerait encore mieux s’il n’y avait pas de Cubain dans le groupe. On nous a souvent demandé si on était des vrais Cubains, comme si d’une certaine manière être Cubain nous donnait des gages de légitimité à jouer notre musique. Nous on s’en moque ! Nous ne jouons pas de la musique cubaine traditionnelle. On puise juste un peu d’inspiration dans les esthétiques musicales de Cuba avec une approche extrêmement libre. Donc avant que le public se pose la question, on préfère la poser nous-mêmes... Et puis nous voulions brouiller les pistes en choisissant l’anglais pour notre côté pop-rock tout en en gardant une identité hispanophone avec les fameux points d’interrogation.
Votre nouvel album s’intitule Pafata. Pourquoi cette référence à la patate ?
Pao Barreto : on adore les pommes de terre, mais ce titre n’a rien à voir avec les patates ! Pafata ou plutôt Páfata est une interjection très employée à Cuba. On a enlevé l’accent pour plus de clarté. Ça pourrait se traduire par «paf» ou «bim» ou encore «bam».
Vous chantez majoritairement en espagnol. Quels sont les thèmes que vous abordez dans vos textes en générale ?
T.C. : il y a pas mal d’ironie dans nos chansons et on parle aussi d’amour. Nunca Mataré, par exemple, exprime l’importance de lutter contre des sentiments négatifs liés à l’honneur comme la rancœur. Sans entrer dans le sens religieux du terme, c’est un morceau qui parle de pardon et des bénéfices à s’élever au-dessus des jugements des autres. Pour mieux s’en soustraire et pardonner plus facilement. Si on pardonnait plus souvent, la planète tournerait sûrement plus rond!
P.B. : la chanson A escondidas raconte l’histoire d’un amour en cachette, un amour que l’on garde pour soi. Un peu comme les enfants à l’école qui n’osent dire à personne qu’ils ont un petit copain ou une petite copine. On aime bien dire à quel point le sentiment amoureux est une émotion agréable à vivre même s’il fait souffrir parfois. Dans tous les cas il vaut mieux avoir le cœur chaud et endurer plutôt que d’avoir le cœur froid et ne rien ressentir du tout.
Pao vous êtes la nouvelle recrue. Vous avez contribué à changer l’esthétique du groupe avec votre voix féminine. Comment avez-vous réussi à trouver votre place avec ces six garçons?
P.B. : j’ai l’habitude de travailler avec des hommes mais aussi avec des femmes bien sûr... Donc, la question se pose plus par rapport aux personnes qu’aux genres des personnes. Tous les membres du groupe ont su m’accueillir, ils étaient ouverts à la nouveauté qu’apportait ma voix. De mon côté j’étais simplement ravie de pouvoir donner le meilleur de moi pour le bien du band. Notre relation évolue dans la confiance et la bienveillance.
Thibaut, vous êtes le directeur artistique depuis la création du groupe nancéen en 2019. La couleur musicale a beaucoup évolué avec cet alliage que vous proposez aujourd’hui. Comment s’est construit cette fusion entre les rythmes traditionnels cubain (son, salsa…) et les colorations pop-rock psychédéliques années 70/80 d’inspiration floydienne?
T.C. : ¿Who’s The Cuban? s’autorise beaucoup de libertés. Le concept du groupe est de partir d’un élément musical de la culture cubaine et de le tordre dans tous les sens pour en faire un truc à nous. C’est à la fois la force du groupe mais aussi une faiblesse puisqu’on aime bien les concepts musicaux facilement identifiables, surtout en France. De notre côté, nous apprécions aussi bien les sonorités afro-cubaines que Pink Floyd ou le rock ! Toutes nos influences sont passées au shaker et ça donne Pafata. Cela se fait assez naturellement en fait, parce que nous avons des parcours différents. On s’autorise tous les clins d’œil possibles ou presque… On essaie de garder une cohérence et un son d’ensemble mais tout cela est bien subjectif de toute façon! En tout cas nous avons notre cohérence à nous... Il faut préciser aussi que nous avons trois nationalités différentes dans le groupe : une chanteuse colombienne, un trompettiste et chanteur cubain, un bassiste vénézuélien outre les Français. Toutes ces apports se ressent dans notre musique.
En quoi Cuba, un pays où vous avez déjà joué, vous a marqué dans votre création musicale?
T.C. : c’est toujours difficile d’expliquer ses goûts. Dans la musique cubaine ce que j’aime en tant que batteur c’est le rythme, la transe que cela génère. Et puis Cuba est une île fascinante puisque c’est déjà en soi un carrefour de cultures, avec des influences africaines, espagnoles, états-uniennes et même un peu françaises après la révolution en Haïti !
Comment s’effectue la répartition du travail au sein du septet en matière de compositions et d’écriture?
P. B. : ce sont les membres du groupe qui composent et écrivent. En général un compositeur arrive avec une proposition, plus ou moins aboutie, et l’arrangement se fait ensemble. Il faut accepter que chaque idée soit essayée et que le morceau soit trituré par un travail collectif. On est en répétition, on essaie pleins de formules et à la fin le morceau est là.
T. C. : ou pas. Il y a des titres que l’on abandonne ! Là sur l’album il n’y a que les meilleurs ou en tout cas les moins mauvais (rires) !
Pafata en CD, vinyles (Smash/L’Autre Distribution/RFI Talent)