HDW, le slameur français multicasquette
HDW, artiste considéré comme l'une des références du slam en France, était en résidence du 13 au 19 novembre au Sénégal dans le cadre du Keur Massar Hip Hop Festival. Portrait.
Casquette sur la tête, Alexandre Sepré, HDW de son nom d’artistes, est le premier à prendre la parole, assis en tailleur sur le tapis rouge d’un salon dakarois. "C’est le slam qui m’a choisi… j’écrivais avant, je lisais mes textes devant des gens, mais je ne savais pas que ça s’appelait du slam", raconte-t-il devant un groupe d’une dizaine d’artistes venus du Québec, de France et du Sénégal.
Du 13 au 19 novembre, le slameur français de 34 ans et originaire du Mans, participe au Keur Massar Hip Hop Festival en banlieue dakaroise au Sénégal. Une résidence d’une semaine sur le thème de la justice climatique où il alterne entre ateliers avec des experts pour partager des connaissances sur les enjeux climatiques, cours de théâtre avec une troupe locale et rédaction de textes.
S’il a commencé le théâtre et l’écriture à l’âge de six ans, Alexandre Sepré explique qu’il a réellement découvert la discipline en 2009 avec le collectif Slam Inspir’. Jusqu’en 2012, il a été actif sur les scènes ouvertes de slam. "Mais c’est un petit milieu où l’on croise souvent les mêmes personnes, les mêmes textes, les mêmes sujets. J’ai eu envie d’autres rencontres et d’autres influences", raconte l’artiste qui ne vient pas d’une famille sensible à la culture. Il commence alors à travailler avec des musiciens.
En 2017, après quatre années de travail et de répétitions, il sort un premier album, Le Voleur de couleurs, avec la pianiste Louise Gravez. Un projet qui lui a permis d’obtenir le statut d’intermittent du spectacle, mais aussi de faire une tournée à l’international et de partager l’affiche avec des artistes comme Grand Corps Malade, Gaël Faye ou BigFlo & Oli. Deux ans plus tard, il est nommé artiste associé au Théâtre de Chaoué d’Allonnes où il travaille sur plusieurs pièces et créations. En 2020, il crée la performance de lecture musicale Détour avec le contrebassiste Paul Rogers et la danseuse contemporaine Florence Loison. "J’arrive avec une gamme de textes et eux font de l’improvisation, on ne sait jamais ce qu'il va se passer", décrit-il.
Spectacle écologique
En juin dernier, il a créé un seul en scène, qui s’appelle Que le texte, mis en scène par le champion de slam Yannick Nédélec. "C’est l’histoire d’un jeune homme qui rêve d’écrire le texte le plus beau du monde et qui va appliquer les conseils d’un manuel… bien évidemment cela ne marche pas. Mais chacun des brouillons est un prétexte pour parler de différents thèmes", décrit HDW. Un spectacle sans lumières, non sonorisé, où l’artiste est seul avec une boîte à musique et un kalimba. "Je voulais montrer que l’on peut produire un spectacle écologique, épuré et qui marche très bien… nous sommes en tournée dans toute la France", explique-t-il. En parallèle, il a un deuxième album en cours de préparation, qui s’appelle Grand brûlé et qui devrait sortir d'ici à trois ans.
Dans son travail, HDW tente de "briser les tabous et faire exploser les secrets pour qu’ils ne restent pas à te bouffer de l’intérieur." Au début de sa carrière, il mettait un peu le fond "de côté", influencé par le rap, pour se concentrer sur la forme et les rimes. Puis son écriture s’est affinée, pour se concentrer sur trois thèmes phares : "la violence sociale, la recherche vaine de l’absolu et l’amour déchu." Autant de thèmes qui sont ressortis d’expériences personnelles, comme la découverte de la précarité en tant qu’artiste alors qu’il est issu de la classe moyenne, d’un burn-out lié au système d’intermittent du spectacle en France ou de la déconstruction de l’approche sentimentale de l’amour.
"La suite pourrait être la justice climatique, mais je ne l’ai jamais abordé frontalement. J’ai peur de poser des mots sur ce thème dense et complexe et de tomber dans des clichés ou d’être moralisateur", explique Alexandre Sepré, encore marqué par l’image d’une plage recouverte de déchets sur laquelle il est tombé en Indonésie en 2017.
"C’est aussi pour cela que j’ai accepté de venir à cette résidence au Sénégal parce que j’ai envie de réfléchir à plusieurs sur cette thématique climatique", confesse le slameur, qui veut éviter un regard français autocentré. Il estime aussi qu’il a un rôle à jouer en tant qu’artiste qui a construit une audience sur les dix dernières années, notamment chez un public scolaire jeune.
"Il faut s’emparer des imaginaires pour lutter contre les dérives du système capitaliste qui a son service marketing et son story telling. C’est en retournant cela que l’on pourra sensibiliser durablement les gens alors que les injonctions ne fonctionnent pas", estime HDW. Il espère alors sortir de cette résidence sénégalaise au minimum avec de la "matière juste" et au mieux avec de nouveaux textes entre les mains.
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