David Walters, sous le soleil des tropiques
C’est un quatrième album qui invite à la danse, mais dans lequel se glisse entre les lignes un propos plus concerné. Avec Soul Tropical, le chanteur David Walters joue de ce contraste entre des musiques caribéennes et des textes en créole plus revendicateurs. Le mélange est très réussi pour ce musicien globe-trotter.
C’est un cliché, mais les chansons de David Walters évoquent le soleil, la mer, et tout ce que l’on imagine autour. Un faux semblant pour cet artiste qui joue en réalité sur les contrastes. "Je m’inspire des musiques cubaines, qui peuvent être hyper dansantes, mais avec des thématiques mélancoliques. Des artistes comme Cesaria Evora ou Bonga font très bien cela. Ce sont des musiques ‘sucrées’, mais teintées de tristesse. J’aime ça parce que cela vous envoie à l’intérieur de vous. Ce n’est pas seulement un feu de joie !", glisse-t-il. Pour son quatrième disque, Mister Walters entend chanter la vie, la tête haute.
C’est bien cette vie qui infuse des morceaux chantés la plupart du temps en créole. Son grand mélange résume bien un garçon dont les origines métisses sont disséminées entre la métropole, la Martinique, la Guadeloupe et Saint-Kitts-et-Nevis. "L’âme tropicale, c’est le lien avec l’Afrique, le côté afro-caribéen. C’est aussi la réunion de l’archipel des Caraïbes, de la Guadeloupe, de la Martinique ou de la Jamaïque, décrit-il. Et puis, c’est celle de ma maman. Elle est partie il y a un an et demi, elle était en Martinique. Depuis, il y a son âme qui plane constamment autour de moi."
Des musiques tropicales, le poing levé
Cette soul tropicale a vu le jour en plusieurs temps. Une première mouture du disque a été écrite avant la mort de cette dernière et mise à la poubelle. Mais c’est finalement en réaction à ce décès que David Walters aura imaginé une musique dans laquelle il n’a pas trop voulu mettre sa peine.
Gimme Love appelle plutôt à chiller dans une ambiance moite quand No One sonne purement disco. Quant à Jodia, c’est un afro-beat de l’espace… C’est d’ailleurs la grande force de ce grand patchwork, d’emprunter de-ci, de-là, tout en gardant un ton très personnel.
S’il ne se présente pas comme engagé, David Walters serait plutôt comme le réalisateur d’un bon documentaire. Sur Toxic Tropic, en featuring avec Anthony Joseph, il fait référence au procès du chlordécone, ce pesticide qui a provoqué une pollution massive dans les plantations de bananes aux Antilles.
Sur Di Yo, qu’il signe avec la Brésilienne Flavia Coelho, il évoque les mouvements sociaux de novembre 2021 en Martinique et à la Guadeloupe. "C’est l’époque où les statues tombaient ! Je devais aller jouer au Martinique Jazz festival. Ça a été annulé parce qu’il y a eu les grèves. Au même moment, j’ai été voir une expo du street artist Banksy. Il y avait un tableau qui montrait des femmes travaillant dans un champ. L’une d’elles s’arrête et fume sur le bord du cadre. Ça résumait bien ce qu’on était en train de vivre", estime le chanteur.
Sous le signe de la soul et du voyage
L’enjaillement d’un Night in Madinina à base d’onomatopées cède le pas à des moments plus acoustiques : An Lot Soleil, Klè. Pour ces titres, le chanteur fait appel aux complices de son projet Nocturne, le percussionniste Roger Raspail, mais surtout le violoncelliste Vincent Ségal et le joueur de kora Ballaké Sissoko.
"C’est comme si Ballaké et Vincent surlignaient l’émotion, explique Walters. Avec eux, j’amène toujours les morceaux les plus purs possible : guitare-voix. Ensuite, on entre en studio et on enregistre en un quart d’heure ou une demi-heure. Ce qui est magique, c’est qu’ils font les choses en une seule prise ! Leurs instruments sont des extensions de leur personne, de leur travail, et de leur talent."
Marqué par les géants de la musique noire américaine, le chanteur cite Nina Simone, Fela Kuti ou Marvin Gaye. "La soul music, c’est la Blaxpotation, les US, Brooklyn, Detroit et la Motown. Mais pour moi, la soul, c’est quand un artiste arrive à mettre son émotion la plus profonde en musique. C’est l’âme de quelqu’un !", appuie-t-il.
Cette musique a, elle aussi, voyagé au moment de sa conception. L’album imaginé à Marseille a été enregistré à Sheffield, en Angleterre, avec le musicien Tom Excell, et à Paris. Il a ensuite été mixé à Los Angeles, aux États-Unis, par le producteur Captain Planet. Le recours à ces jeunes artistes spécialisés dans les musiques métisses a donné le liant qu’il fallait à une sauce créée sous le regard du DJ Guts (Alliance Ethnik, Svinkels, De la Soul).
Dans la lignée de son disque, David Walters veut "que ses concerts soient des messes de joie". Pour la scène, il jouera en trio avec un batteur et une femme aux claviers et aux chœurs. Un orchestre de poche pour rendre grâce à un album d’une grande classe !
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