Les voyages de La Rue Kétanou
La Rue Kétanou célèbre les 20 ans d’un trio devenu quatuor avec leur nouvel album, 2020. Un disque de voyages et de retrouvailles qui célèbre l’amitié, la fête et les musiques du monde.
Ils commençaient à manquer. Six ans après Allons-voir, La Rue Kétanou revient avec 2020 et un nouveau membre, Pierre Luquet, compagnon de scène et "enfant spirituel", qui apporte ses deux accordéons et une nouvelle vision : "Il est un peu plus jeune que nous et il a une autre manière d’être, ça nous enrichit. Il a trouvé sa place impeccablement", selon Mourad Musset.
Des instruments du monde
Un album composé sur les routes. Quinze titres, réalisés par Nicolas Quéré (Arctic Monkeys, Delgrès) avec lequel La Rue Kétanou signe là aussi une première collaboration fructueuse. 2020 s’ouvre comme une malle de voyage, qui fait la part belle à de nouveaux instruments, découverts au Québec, au Bénin ou encore en Amérique du Sud… Ainsi, le charengo et la flûte de pan de Bolivie et le banjo des Appalaches (Peuple migrant), la mandole (Elle s’appelle) et le ney, flûte orientale (Gbaou Gbaou) de Rachid Benallaoua s’accordent à merveille avec les guitares et les accordéons du groupe.
2020 propose aux fans de "La Rue Ket’" un nouvel embarquement, à travers un disque poétique et généreux qui célèbre toujours la joie d’être ensemble et de faire la fête (Le Beaujolais, Gbaou Gbaou) et l’urgence de vivre en jouissant des choses simples.
La Rue Kétanou fait l’apologie de la liberté des cœurs et des corps, y compris féminins : "Elle a le diable au corps et l’Alléluia dans son âme. À bas les vies toutes tracées, vive la liberté !" (La Divorcée). Elle chante toujours la beauté des amours éphémères. Des ballades comme Elle s’appelle ou Les Hirondelles qui, par un clin d’œil aux Feuilles mortes de Prévert et Kosma, invitent à la légèreté au son de l’accordéon… "L’amour se ramasse à la pelle et les feuilles mortes emportées par le vent sont parties loin d’ici".
C’est aussi des sujets graves. Le poignant Accroche-toi s’écoute comme une supplique onirique qui aborde avec pudeur la maladie d’une jeune fille : "À cheval entre deux sondes, drôle d’animal, les secondes passent comme des secondes. On soigne le mal par le mal".
Ou l’exil avec la réaliste Peuple migrant, dans laquelle le chanteur du groupe, Florent Vintrignier, décrit ce qu’il imagine d’une traversée clandestine : "Le silence est maître à bord pour ne pas faire de remous, pourvu que dorme l’eau qui dort l’embarcation tient le coup". La Rue Kétanou aborde également la guerre avec Soldat ravale, à partir d’un texte du metteur en scène et auteur de théâtre Lazar.
Des chansons parfois graves donc, mais jamais désespérées, car le groupe se sent toujours le devoir "d’écrire un monde dans lequel nos enfants puissent vivre, de garder cette fenêtre ouverte, de continuer à distribuer l’espoir des choses simples. Il n’y a pas besoin d’être millionnaire pour être heureux".
Les copains d’abord
La Rue Kétanou reste aussi fidèle à l’une de ses plus grandes valeurs, l’amitié, à travers des retrouvailles et de nouvelles collaborations avec des artistes qu’ils admirent : "On a décidé de se faire plaisir, de rencontrer des amis. On a donc fait cinq résidences : à Marseille, Toulouse, dans le Nord avec Loïc Lantoine, en Norvège avec Stéphane Cadé et à Rochefort-sur-Loire avec Titi Robin et René Lacaille", sourit Mourad Musset.
L’île de la Réunion est aussi présente avec le guitariste René Lacaille sur l’espiègle Chikungunyia, une chanson épicurienne, au refrain créole. Une opportunité merveilleuse pour le groupe, touché par le plaisir de jouer avec un "grand qu’on écoutait quand on était jeune, plein de vie, soucieux de transmettre et partager". Même plaisir pour Ne m’en veux pas où l’on retrouve les guitares gitanes de Titi Robin.
Un partage que l’on trouve enfin dans Gbaou Gbaou, un bouquet final dans lequel La Rue Kétanou invite le chanteur Gari Greù (Massilia Sound System), les frères Mouss et Hakim du groupe Zebda, rythmés par la flûte des Andes et le banjo péruvien. Une chanson jubilatoire et dansante, écrite en partie au Bénin où La Rue Kétanou était invitée par la fanfare N’Yolé et les Ogres de Barback, également présents sur le titre. Pour La Rue Kétanou, cette première rencontre avec le Bénin "c’est des couleurs, des odeurs, une ferveur, une explosion de vie". Gbaou Gbaou est écrite en fon et en français, pour "marcher pour l’amour, autour de l’arbre de la vie pour ne jamais oublier qu’ils n’ont pu enlever la vie au royaume de Dahomey", et ainsi célébrer la vie, la musique et la mémoire.
La Rue Kétanou 2020 (LRK Productions 2020) 2020
Site officiel / Facebook / Instagram