Danyel Waro
Sur son nouvel album généreux, Aou Amwin, Danyel Waro entrouvre la porte du maloya réunionnais pour inviter des Corses, un Sud-africain à venir partager sa poésie créole.
C’est une certitude : le formatage, en matière de musique, ne passera pas par Danyel Waro. Sur le fond, on sait le Réunionnais attaché à un maloya aussi poétique que dépouillé. Chant, roulèr, kayamb : il ne lui en faut souvent pas davantage, bien que cette fois il ait fait une place à la sanza, à la flûte...
La démarche est authentique, sans compromission, à l’image de l’artiste qui tient à rester en prise avec sa réalité, enregistrant chez lui à Trois Mare. Sa poésie créole est exigeante mais il a su trouver le moyen, en la chantant – et de quelle manière ! – de la faire vivre. La notion de liberté qui l’habite dépasse les mots, elle se devine aussi à travers ce double album Aou Amwin en regardant simplement la liste des morceaux : Salim, poème dédié à un ami luthier disparu en 2001, dépasse les 21 minutes ; la chanson précédente, intitulée Larzan Karné et écrite en 1978, fait moins de 3 minutes. Quant à l’intro de Kiliman, elle dure aussi longtemps que le morceau lui-même…
Si ce projet est aussi placé sous le sceau des rencontres, ce qui constitue une nouveauté dans la carrière de Danyel, là encore cela prend des formes très différentes, voire inhabituelles puisque l’on retrouve le groupe corse A Filetta à trois reprises. Entre les polyphonies léchées et le timbre singulier du Réunionnais, le jeu de voix révèle de vraies surprises, mais donne la sensation de rester parfois artificiel.
Même impression pour la reprise de Mandela, un titre paru sur Bwarouz en 2002, avec le chanteur sud-africain Tumi, dont le nom est en général accolé à celui de son groupe The Volume. L’univers de Waro est si personnel et personnalisé qu’il n’est guère aisé de se l’approprier pour briller avec autant d’éclat.
Danyel Waro Aou Amwin (Cobalt/L’Autre Distribution) 2010