Thiéfaine, l'inespoir fait vivre

Thiéfaine, l'inespoir fait vivre
Hubert-Félix Thiéfaine © DR

Le dixième-septième disque d'Hubert-Félix Thiéfaine, Stratégie de l'inespoir, apparaît comme le pendant rêche du Suppléments de mensonge paru voici trois ans. Ayant enfin trouvé la reconnaissance médiatique, le chanteur laisse souvent la composition à d'autres et les clés de la maison à son fils, Lucas. Apaisé, le sieur Hubert-Félix ?

Les deux derniers albums d'Hubert-Félix Thiéfaine ont beaucoup plus en commun que la pochette en noir et blanc et la formulation de leur titre. Suppléments de mensonge et Stratégie de l'inespoir, se font écho, nous disant que dans ce monde-là, se perdre est une question de méthode.  

La méthode de Thiéfaine ou plutôt sa marque de fabrique depuis plus de trente-cinq ans, est celle d'une poésie noire dont le flot déborde son auteur. "Bercé par les étoiles d'une essence romantique / j'ai longtemps cherché mes visions dans les flammes", lâche-t-il dans la chanson titre. Ou encore : "D'aucuns me disent rebelle et ignifugé / mais mes divagations n'emmerdent plus personne / je caresse mon corbeau en chantant Duruflé / et joue pour les voyous virés de la Sorbonne".
 
Il suffit de voir le portrait au verso du livret pour être convaincu que le diable et lui ont souvent eu à faire ensemble. Plus court que son prédécesseur, moins caressant, Stratégie de l'inespoir est un disque rêche dans lequel "l'amour désaffecté" succède aux "lubies sentimentales". Thiéfaine se promène dans les vestiges de l'écrivain Louis-Ferdinand Céline (Retour à Célingrad) et danse sur les ruines de l'utopie communiste (Karanganda (Camp 99)). Il emprunte à Itinéraire d'un Naufragé, cette œuvre restée inédite en raison de sa noirceur, son Angélus.
 
Comme d'habitude entièrement écrit par lui-même, ce nouveau disque a largement été composé par d'autres. A côté de JP Nataf, Cali, Jeanne Cherhal ou Arman Méliès, auteur des plus belles mélodies ici, se glissent le leader de Skip the Use, Mat "Bastard" Monnaert, Julien Perez (aka Perez), ou l'homme de l'ombre idéal, Yan Péchin. Mais la chose la plus marquante, c'est l'omniprésence de Lucas Thiéfaine, fils de..., qui co-réalise pour son père et figure presque partout.
 
Résolument rock, Stratégie de l'inespoir confirme le retour en grâce et la reconnaissance médiatique – bien méritée, après tout ce temps passé sur les autoradios familiaux- de Thiéfaine. A moins d'avoir les yeux bandés, il serait difficile de ne pas le voir.  
 
Hubert-Félix Thiéfaine Stratégie de l'inespoir (Columbia/Sony Music) 2014
Site officiel d'Hubert-Félix Thiéfaine
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